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GENERATION-MIGRATION
Esperanza Gomez & ses petites-filles Lara et Fanny Fracheboud
Esperanza Gomez, née Diez Garcia, a vu le jour en 1954 à Ponferrada dans la province de Léon. Elle est arrivée en Suisse avec ses frères et sœurs en 1962, quelques mois après ses parents. Après une enfance passée à Troistorrents, Esperanza s’est installée à Monthey avec son mari et leurs trois filles. L’une d’elles, Maria-Encina, l’a accompagnée à notre rencontre avec ses deux filles : Lara, employée de commerce dans les assurances, et Fanny, étudiante à l’Ecole d’infirmières.
Que reste-t-il de la culture espagnole dans leurs vies ? Grand-maman, fille et petites-filles ont causé librement sur ce thème.
EG = Esperanza, grand-maman
MF = Maria-Encina, sa fille
L+F = les petites-filles Lara et Fanny Fracheboud
MF Quand on a parlé du projet GÉNÉRATION–MIGRATION, Lara et Fanny m’ont dit: Oui, mais on ne va pas savoir que dire… En effet, elles ont l’impression de n’avoir rien gardé de l’Espagne. Alors je leur ai montré une chose en lien avec l’Espagne qui fait partie de notre vie: la crèche de Noël avec ses personnages et le fameux petit gars qui « fait caca » dans un coin. Un porte-bonheur, dans notre culture. Mais pour mes filles, cela n’est ni espagnol ni suisse. C’est «chez nous ».
EG J’avais 8 ans quand je suis arrivée en Suisse. Dans ma manière de cuisiner, par exemple, je suis bien restée «espagnole». Cependant quand je vais en Espagne, je m’énerve parce que là-bas les gens sont trop laxistes et qu’il faut attendre des heures pour être admis dans une administration. Au supermarché, le client qui te précède prend tout son temps pour raconter sa vie, et ça me tue!
MF Ce qui nous reste des traditions, c’est, comme je l’ai dit, la crèche de Noël avec son village, ses personnages, son lac, ses ponts, ses maisons… Et puis les raisins du 31 décembre – on ne peut pas passer le cap de l’année sans manger nos 12 grains de raisin aux 12 coups de minuit, un porte-bonheur pour les 12 mois de l’année à venir – et enfin l’habit neuf étrenné le jour des Rameaux. Souvent des chaussettes, d’ailleurs… Mais nos filles ne se rendent pas compte que ce sont des choses rapportées d’Espagne. Dans la famille, nous ne sommes pas très pratiquants. Et il y a là une contradiction: des traditions très catholiques, ancrées dans les mœurs et conservées, même si l’on n’est pas croyant. C’est un côté un peu folklorique.
EG Nous avons encore de nombreux liens avec l’Espagne. Je suis de Ponferrada MF MF EG EG -20- -21 - et mon mari de Coruña en Galice. Nos filles votent en Espagne. Deux d’entre elles, dans le village où mon mari est recensé et avec ma cadette et mes petites-filles, nous votons à Ponferrada. En plus nous regardons tous les jours la TV espagnole. Il y a aussi le choix du prénom de notre fille aînée, Maria-Encina, née le jour de la fête de la Vierge de la Encina, la patronne de Ponferrada à qui est dédiée la basilique. Peut-être y a-t-il un peu de nostalgie du pays dans le choix de ce prénom…
EG En quittant l’Espagne, nous ne savions pas où nous allions et moi je croyais qu’il y avait des baguettes magiques là où nous attendaient papa et maman.
EG J’ai un assez bon souvenir de notre arrivée à Troistorrents. On nous a bien accueillis, même si nous étions la seule famille étrangère au village. Un instituteur nous a pris en charge durant l’été pour nous préparer à l’école. Et puis Monsieur le Curé, alors président de la Commission scolaire, nous a beaucoup aidés en relativisant nos difficultés auprès de la religieuse qui enseignait: «Mais ma Sœur, c’est comme le slalom, on peut toujours louper une porte. »
MF Maman est restée fidèle à la musique espagnole et au flamenco. Lara et Fanny ont appris la danse classique et le jazz. Mais quand elles étaient petites, elles ont eu envie de faire du flamenco. Et c’est leur grand-maman qui leur a offert les cours.
L+F L’espagnol? On a fait l’Ecole espagnole quand on était petites et après on a arrêté. Comme maman donnait des cours d’espagnol, on l’a aussi appris avec elle. En fait, on l’a toujours entendu chez nos grands-parents. Mais si quelqu’un fait un commentaire quand on parle espagnol, du coup on ne le parle plus.
EG C’est vrai qu’à la maison avec mes beaux-frères et mes belles-sœurs on parlait français. Souvent on mélangeait. Mais nos trois filles sont bilingues.
L+F Suisse ou Espagnole? Comment on se sent? C’est compliqué. Si on me demande ce que je suis, je vais répondre que je suis valaisanne. Mais après, il y a quand même toute la culture espagnole que notre maman et notre grand-maman nous ont transmise. Quand on va chez la abuela, on entend des chansons espagnoles, on mange espagnol, on vit espagnol.
MF A 18 ans, nos filles ont dû décider de conserver ou non la nationalité espagnole, étant donné que je suis née en Suisse. Elles avaient trois ans pour la récupérer. Du coup, elles ont pris contact avec le Consulat et elles ont gardé les deux nationalités.
L+F Je suis suisse dans la façon de penser, mais je ne renie pas pour autant la nationalité espagnole. Enfin un point qui nous distingue de certains amis suisses, nous tous les dimanches on allait voir nos grands-parents, parce que la famille, ça reste toujours le plus important.
Mi abuela
Chaque bricolage que je fais
Est à ton image
Toi si créative, avec toujours des idées inventives
Je te vois danser, applaudir et sourire
Tout en nous partageant des chansons que tu aimes
et que tu nous fais découvrir
Lorsque je cuisine je pense à toi
Tu es dans les odeurs, le goût de mes plats
C’est toujours avec fierté
que je montre à mes amies tes créations
Que ce soit ta crèche, tes costumes de carnaval ou tes décorations
Tu aimes manger, cuisiner, jouer aux cartes, bricoler, fabriquer, imaginer
Tu aimes ta famille, à travers chacune de ses choses
quand tu danses avec nous en agitant des spatules
quand tu nous réclames des bisous
parce qu’on ne t’en donnera jamais assez
Te queremos mucho con todo nuestro corazón abuela
Lara et Fanny
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